Manager : Comment agir au quotidien pour prévenir les RPS et soutenir l'engagement ?
Les dizaines de milliers de managers formés chez nous ont déjà entendu parler de ce sujet majeur que sont « les attentes » dans la question du management. Entre désir, non-dits, envie et fantasmes, c’est un quotidien souvent désarmant pour des centaines de milliers de managers qui se retrouvent à devoir accompagner des situations de plus en plus complexes nécessitant de la psychologie et du recul.
A l’heure où l’engagement perd 8 points selon les derniers résultats du Baromètre National de l’Engagement au Travail (supermood), proposer un éclairage concret sur ce sujet nous semble utile, et opportun. Rappeler comment les échanges centrés sur la personne, et non ses actions, peuvent être source de prévention et de régulation, mais aussi apporter un angle concret dans le tourbillon d’actualité RH qui doit donner parfois le tournis…pour ne pas dire la nausée, à nos cher.es DRH.
Une « attente » porte une dimension psychologique forte – c’est une tension vers un état désiré…et le désir, nait du manque. Il s’agit donc de construire un échange autour de ce qu’il manque. Il faut comprendre ici le manque non pas comme un « loupé » managérial, mais comme un espace à « remplir » ou dont il faut s’occuper, c’est-à-dire auquel il faut répondre. Cet espace nait du mouvement permanent, des évolutions normales qu’un collaborateur vit, ressent, dans sa vie professionnelle.
Partant du principe que chaque individu est différent par nature, il faut y rajouter un « dynamique » qui complexifie l’acte managérial. Penser son métier de manager comme la nécessité d’anticiper les besoins, les attentes et les désirs de chacun est une erreur, et contre-productif.
En revanche, savoir dépasser le biais de confirmation pour interroger ou réinterroger plusieurs fois dans l’année, les sources de motivation, de satisfaction et d’insatisfaction, çà c’est le métier du manager.
Comme la qualité de vie et des conditions de travail se nourrit de 3 grands sujets ( le développement de la personne, le contenu du travail et les conditions du travail), il semble que nous ayons ici un moyen pratique de « déminer » les situations et de prévenir les risques.
Pour organiser cet échange, l’on propose souvent de le construire autour de quatre grands thèmes : l’entreprise, l’équipe, le métier et le manager. A l’aune des 3 domaines de la QVCT, et si l’objectif est de prévenir les RPS, il devient peut-être pertinent de faire exprimer les attentes des salariés sur ces 3 thèmes, tout simplement. Il va s’agir ici de discuter autour de la « relation » qu’entretient le salarié avec chacun de ces sujets, étant entendu qu’en les scannant, il est fort probable qu’on arrive à identifier des sujets clés pour elle ou pour lui.
A l’usage, ce moment d’échange, bien préparé, structuré et mené cumule de nombreux avantages et remplit plusieurs fonctions.
Il permet de répondre au besoin de considération revendiqué dans de nombreuses études depuis plusieurs années, il permet de scanner l’ensemble des sujets sources de tensions et de prévenir les risques inhérents, il permet d’ajuster les avis, les visions et de mettre des mots, des « oui », des « non », d’être clair, explicite. Il permet de parler de l’exigence émotionnelle particulièrement forte en ce moment, il permet de parler de l’intensité du travail, du sentiment d’équité, de justice.
Comme le précise la dernière enquête de la fondation Jean Jaurès sortie en Février 2023, la recherche d’épanouissement à court terme se substitue à l’attachement au statut[i].
L’étude précise « qu’il ne s’agit plus tant de se réaliser au travail, que de s’y sentir bien ». Voilà que les enjeux sont déjà en train de changer alors que le vernis des dernières tendances de 2021 est à peine sec. Vient ensuite en second dans l’étude, le « sens donné à son travail ». Et encore une fois, la formulation est précise et sans appel. Sens donné à « son » travail. Il s’agit bien que chacune et chacun fasse le travail de « donner du sens » et le management a une utilité précise ici.
Bien sûr, selon les métiers et les conditions de travail, ces besoins sont plus ou moins exprimés…les métiers rudes, pénibles, aux horaires décalés appellent souvent à des préoccupations encore plus simples et fondamentales dans l’attention qu’il faut leur porter.
Le grand sujet de la QVCT en entreprise peut donc aussi s’accompagner de gestes simples et pratiques, facilement réalisables, au titre de l’action préventive voir curative.
Il s’agit de rester ancré, simple, dans un management accessible et épuré qui va à l’essentiel : la personne…car c’est d’elle dont parle toute la philosophie de la QVCT depuis plus de 30 ans…ne l’oublions jamais à l’heure des tentatives (tentations) d’intermédier la relation qu’entretient l’entreprise avec ses salariés.
Les managers sont là, présents, et sont extrêmement utiles et pertinents pour agir vite et gérer la complexité humaine.
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[i] Le rapport au travail post-Covid – Fondation Jean Jaurès et Ifop – Février 2023